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Évangile selon saint Luc

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L'Évangile selon saint Luc (kata Lukas, où kata signifie selon) a pour auteur Luc (médecin et, selon la légende, peintre, compagnon de saint Paul). Il n'a pas connu lui-même le Christ, durant son ministère public. Il a également composé les Actes des Apôtres, qui sont la suite de son évangile. Les deux livres sont pareillement dédiés à "Théophile" (personnage réel, ou peut-être fictif, figure de l' "ami de Dieu", Théo-phile).

Les deux ouvrages ont été rédigés probablement dans les années 60, avant la destruction du Temple (en 70), et avant le martyre des saints apôtres Pierre et Paul à Rome (en 64 ou 67).

Avec l'Évangile selon saint Marc et l'Évangile selon saint Matthieu, il fait partie des évangiles dits synoptiques. C'est le plus long de nos quatre évangiles, retenus dans le Nouveau Testament.

Auteur

Il y a deux traditions relatives à l'auteur du Troisième Évangile.

L'une, orale, fut transmise par Gégoire le grand puis Théophylacte jusqu'à Jacques de Voragine et Anne Catherine Emmerich: L'évangéliste n'était autre que le compagnon anonyme de Cléopas. Épiphane de Salamine lui donnait pour nom Nathanaël [1]

L'autre, scripturaire, voyait en lui le compagnon de Paul. Saint Irénée note dans son Adversus Haereses (vers 180): "De son côté, Luc, le compagnon de Paul, consigna en un livre l'Évangile que prêchait celui-ci." (Adv. Hae. III, Prologue)

Un ancien prologue grec de l'évangile de Luc, daté de la fin du second siècle, décrivait ainsi la genèse de cet évangile, et son auteur: "Luc était un syrien d'Antioche, médecin de profession, disciple des apôtres, et plus tard un accompagnateur de Paul jusqu'à son martyre. Il servit le Seigneur sans divertissement, sans femme et sans enfants. Il mourut à l'âge de 84 ans, en Béotie, rempli du Saint Esprit." Ce prologue poursuit: "Quoique des évangiles existassent déjà, celui selon Matthieu, composé en Judée, et celui selon Marc en Italie, il fut incité par le Saint Esprit, et composa cet évangile entièrement dans la région avoisinant l'Achaïe; il rend très clair dans le prologue que les autres (évangiles) avaient été écrits avant le sien [...] Plus tard le même Luc écrivit les Actes des Apôtres." (Cf. Joseph A.Fitzmyer, The Gospel according to Luke, I-IX, 1981, page 38-39).

De même le Canon de Muratori (document romain du milieu du IIe s.) : "Troisièmement, le livre de l'évangile selon Luc. Ce Luc était médecin. Après l'Ascension du Christ, Paul l'ayant pris pour second à cause de sa connaissance du droit, il écrivit avec son assentiment ce qu'il jugeait bon." Il continue: "Cependant lui non plus ne vit pas le Seigneur dans la chair. Et par conséquent selon ce dont il avait pu s'informer il commença à le dire à partir de la Nativité de Jean."

Saint Paul de Tarse se réfère à Luc en Col 4,14 où il l'appelle "le cher médecin"; de même dans l'épître à Philémon (24) où Luc se trouve en compagnie de Marc, pendant la première captivité romaine de Paul, et dans la deuxième à Timothée (4,11): "Seul Luc est avec moi." Luc pourrait avoir été, sous les directives de Paul, le rédacteur des épîtres dites pastorales (1 Tm ; 2 Tm ; Tt). En effet, on croit y reconnaître son style.

Les trois cantiques

C'est dans Luc que l'on trouve les trois célèbres cantiques, repris dans la liturgie des heures :

Marie livrant ses souvenirs, soit à l'apôtre Jean soit directement à l'évangéliste Luc, affirme à deux reprises qu' "elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son cœur." (Lc 2,19; cf. 2,51). Si elle a conservé tous ces souvenirs, c'était pour la postérité. Si elle les a médités, c'est qu'elle a dû chanter bien souvent dans son cœur les cantiques qui y sont contenus. Toute cette poésie est emplie de réminiscences bibliques. Effectivement, si de tels souvenirs sont parvenus à la connaissance de Luc, et à la nôtre, ce ne peut être que par Marie.

Luc, l'évangéliste de la miséricorde

L'analyse des sources de l'Évangile selon saint Luc met en évidence son originalité.

Saint Irénée a puissamment résumé, dans une page célèbre (cf. Adv. Hae. III, 14, 3), la nouveauté de l'évangile de Luc. Il recoupe notre exposé du précédent titre.

Luc en personne, dans son Prologue, a précisé sa méthode et sa préoccupation première.

"Puisque plusieurs ont entrepris de composer un récit des événements qui se sont accomplis parmi nous, d'après ce que nous ont transmis ceux qui furent dès le début témoins oculaires et serviteurs de la Parole, j'ai décidé, moi aussi, après m'être informé exactement de tout depuis les origines d'en écrire pour toi l'exposé suivi, excellent Théophile." (Lc 1,1-3).

Théophile devait être un éditeur de Rome par lequel Luc a publié son double ouvrage de l'évangile et des Actes (cf. Ac 1,1), mais aussi un chrétien fervent qui, en l'espèce, nous représente tous.

Luc a décidé de suivre l'exemple de plusieurs confrères : Matthieu l'apôtre qui (en hébreu ?), avait publié l'enseignement du Seigneur et plusieurs de ses faits et gestes. Marc l'interprète et le confident de Pierre et qui lui-même avait assisté, au sortir de l'enfance, à la Passion du Sauveur et qui avait fréquenté, chez sa mère, les apôtres et la première communauté chrétienne.

Philippe enfin, le diacre et compagnon d'Étienne, qui, selon une hypothèse, entreprenait avec l'aide de Luc de confectionner un évangile original reprenant les logia de Matthieu, mais qu'il n'écrirait et ne publierait qu'après le départ pour Rome de Luc et de Paul.

Luc a interrogé les "témoins oculaires et [les] serviteurs de la Parole", ceux de la première génération qui avaient connu le Seigneur: avant tous Jean, l'apôtre, et même la mère de Jésus, ainsi que les "frères du Seigneur": Jacques, Simon et Jude, et avec eux toute l'Église de Jérusalem, héritière au premier chef de la pensée et de la mémoire de Jésus le Nazaréen. Il enquêta sur place en Palestine, profitant de son séjour forcé et prolongé dans la patrie du Christ. Philippe et Luc, dans leurs investigations, travaillèrent en commun avec Paul, puisqu'il nous est précisé que ce dernier pouvait recevoir librement dans sa prison (cf. Ac 24,23).

Luc est allé aux sources, ainsi qu'aux documents originaux, comme lui-même l'affirme avec insistance. Il l'a fait en historien consciencieux, même si son œuvre demeure artisanale à bien des égards, comme l'analyse l'a montré.

Si l'on poursuit dans le détail la comparaison de Luc avec les autres synoptiques, on observe sur le vif l'activité d'un écrivain qui excelle à présenter les choses d'une manière qui lui est propre, évitant ou atténuant tout ce qui peut froisser, ou bien ce qui serait peu compréhensible au lecteur, ménageant les personnes des apôtres, ou les excusant, interprétant les termes obscurs, ou précisant la géographie.

En vrai "scriba mansuetudinis Christi", écrivain de la mansuétude du Christ (Dante), il aime à souligner la miséricorde de son Maître pour les pécheurs (15,1.7.10), à raconter des scènes de pardon (7,36-50). Il insiste volontiers sur la tendresse de Jésus pour les humbles et pour les pauvres, tandis que les orgueilleux et les riches jouisseurs sont sévèrement traités (16,19-31).

Cependant même la juste condamnation ne se fera qu'après les délais patients de la miséricorde (13,6-9). Il faut seulement qu'on se repente. Ici Luc tient à répéter l'exigence d'un détachement décisif et absolu des richesses (14,25-33).

On notera les passages propres au troisième évangile sur la nécessité de la prière (18,1-8) et l'exemple qu'en a donné Jésus (6,12).

Enfin comme chez saint Paul, et dans les Actes (suites de l'évangile), l'Esprit Saint occupe une place de premier plan que Luc seul souligne (4,1; 24,49).

Ceci avec l'atmosphère de reconnaissance et d'allégresse spirituelle qui enveloppe tout le troisième évangile achève de donner à l'œuvre de Luc cette ferveur qui touche.

Extraits

Lc 1,26-28 : Au sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, vers une vierge qui était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph ; et le nom de la vierge était Marie. Etant entré où elle était, il lui dit : " Salut, pleine de grâce ! Le Seigneur est avec vous..."

Lc 2,4-7 : Joseph aussi monta de Galilée, de la ville de Nazareth, en Judée, à la ville de David, qui s'appelle Bethléem, parce qu'il était de la maison et de la famille de David, pour se faire recenser avec Marie son épouse, qui était enceinte. Or, pendant qu'ils étaient là, le temps où elle devait enfanter s'accomplit, et elle mit au monde son fils premier-né, l'emmaillota et le coucha dans une crèche, parce qu'il n'y avait pas de place pour eux dans l'hôtellerie.

Lc 2,44-47 : Pensant qu'il était avec la caravane, ils marchèrent tout un jour, puis ils le cherchèrent parmi leurs parents et leurs connaissances. Ne l'ayant point trouvé, ils s'en retournèrent à Jérusalem en le recherchant. Or, au bout de trois jours, ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant ; et tous ceux qui l'entendaient étaient ravis de son intelligence et de ses réponses.

Lc 13,34-35 : "Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés ! Que de fois j'ai voulu rassembler tes enfants comme une poule sa couvée sous ses ailes, et vous n'avez pas voulu ! Voici que votre maison va vous être laissée (déserte). Je vous le dis, vous ne me verrez plus que ne [soit venu quand] vous direz : Béni celui qui vient au nom du Seigneur ! "

Lc 22,60-62 : Pierre dit : " Homme, je ne sais ce que tu dis. " Et à l'instant, comme il parlait encore, un coq chanta. Et le Seigneur, s'étant retourné, arrêta son regard sur Pierre, et Pierre se souvint de la parole du Seigneur, comme il lui avait dit : " Avant que le coq ait chanté aujourd'hui, tu me renieras trois fois. " Et étant sorti, il pleura amèrement.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Revues

  • Dans la revue Biblia, Cerf, Paris. Aller sur le site du Cerf et cliquer sur "Biblia"
    • n°24 (déc.2003)
    • n°25 (janv.2004)
    • n°26 (fév.2004)
  • Dans la revue Cahiers Évangile, Cerf, Paris.
    • n°5, Augustin George, "Pour lire l'Évangile selon saint Luc", 1973.
    • n°114, Odile Flichy, "L'œuvre de Luc", 2000, 66p.
    • n°137, Yves Saoût, "Évangile de Jésus Christ selon Saint Luc", 2006.
  • Dans la revue Les Dossiers de la Bible,
    • n°9, "Saint Luc", 1985, 31p.
    • n°99, "Jésus selon saint Luc", 2003, 35p.

Livres

  • 2005 : Roland Meynet, L'Évangile de Luc, Lethielleux, Coll."Rhétorique sémitique", Paris.
  • 2003 : Roselyne Dupont-Roc, Saint Luc, éd. de l'Atelier, Coll. "La Bible tout simplement", Paris, 160p. ISBN 2-7082-3679-2.
  • 1998 : Jean-Noël Aletti, Quand Luc raconte. Le récit comme théologie, Cerf, Coll. "Lire la Bible" n°115, Paris.
  • 1998 : Michel Gourgues, Les deux livres de Luc, Lumen Vitae, Coll. "Connaître la Bible", n°7/8, 107p.
  • 1998 : Marc Girard, De Luc à Théophile. Un évangile fait sur mesure pour notre temps, Médiaspaul, Montréal, 356p.
  • 1997 : Michel Gourgues, Les paraboles de Luc, Médiaspaul, Montréal, 107p.
  • 1993 : Hugues Cousin, L'évangile de Luc, Bayard-Novalis, Coll. "Commentaire pastoral".
Repris dans Les évangiles. Textes et commentaires, Bayard, Coll. "Compact", 2001, p.537-850.
3ème éd. 1999.

Liens externes