Évangile selon saint Marc

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L'Évangile selon saint Marc (en grec kata Markon, où kata signifie selon) forme avec les trois autres évangiles, le cœur du Nouveau Testament, la partie de la Bible écrite après la venue du Christ. Le deuxième (par sa place) des quatre évangiles canoniques est aussi le plus bref et probablement le plus ancien ; c'est l'un des évangiles synoptiques.

Son auteur est Marc, généralement identifié au Marc compagnon de Paul, puis de Pierre, qui est connu par le Nouveau Testament, spécialement les Actes des Apôtres et les épîtres de Paul et de Pierre. Dans la symbolique des Quatre vivants, cet évangéliste et son œuvre sont représentés par un lion ailé.

L'Évangile selon saint Marc est lu lors des messes tout au long de l'année liturgique "B" (p.ex. de l'Avent 2005 au Christ-Roi 2006 ; fin 2008 - 2009 ; fin 2011 - 2012).

Origine

Au début du IVe s., l'historien Eusèbe de Césarée écrit qu'après que l'apôtre Pierre eut entrepris de prêcher à Rome, au début du règne de l'empereur Claude (vers 41-42), les auditeurs de Pierre "ne tinrent pas pour suffisant de l'avoir entendu une fois pour toutes, ni d'avoir reçu l'enseignement oral du message divin, mais que, par toutes sortes d'instances, ils supplièrent Marc, dont l'évangile nous est parvenu et qui était le compagnon de Pierre, de leur laisser un monument écrit de l'enseignement qui leur avait été transmis oralement: ils ne cessèrent pas leurs demandes avant d'avoir contraint Marc et ainsi ils furent la cause de la mise par écrit de l'évangile appelé 'selon Marc'."

"L'apôtre, dit-on, connut le fait par une révélation de l'Esprit; il se réjouit du désir de ces hommes et il confirma le livre pour la lecture dans les assemblées."

"Clément, au sixième livre des Hypotyposes, rapporte le fait et l'évêque d'Hiérapolis, nommé Papias, le confirme de son témoignage." (H. E. II, 15, 1-2).

La relation d'Eusèbe de Césarée se trouve confirmée par le témoignage de l'Église ancienne, non seulement Clément d'Alexandrie et Papias, mais encore Irénée et même, semble-t-il, le Canon de Muratori (quoique lacuneux).

On a émis l'hypothèse que le texte de saint Marc est été une sorte de haggadah chrétienne, rappel des événements de la "Pâque" du Christ destiné à être lu lors de la vigile pascale, par analogie avec la haggadah israélite (sur l'Exode) lue lors de la célébration de la Pâque juive.

Auteur

Saint Irénée de Lyon écrivait vers 180 : "Marc, le disciple et l'interprète de Pierre, nous transmit lui aussi par écrit ce que prêchait Pierre". (Adv. Haer. III Prologue). L'influence de Pierre se lit, paradoxalement, dans la grande humilité de son porte-parole : à la différence de Matthieu et de Jean, Marc n'insiste pas sur la primauté de son chef et ne cache rien de ses faiblesses.

Cet évangile "selon Pierre" est l'évangile du "Fils de Dieu" et aussi du "Fils de l'Homme". Marc montre la divinité de l'Homme-Dieu et souligne en même temps la réelle humanité de Jésus, compatissant ou pris de colère, anxieux ("Mon âme est triste à mourir", Mc 14,34) ou assoupi (cf. Mc 4,38).

Sans doute Marc se peint-il lui-même dans son évangile comme le jeune homme qui s'enfuit, sans son manteau, durant la nuit de Gethsémani (cf. Mc 14,51-52). Il est le "Jean, surnommé Marc" mentionné en Ac 12,12.

Datation

Cet évangile a probablement été écrit avant la destruction du Temple et de Jérusalem en 70, car dans le discours eschatologique de Mc 13 il n'est fait aucune distinction entre la ruine de Jérusalem et la fin du monde (cf. Mc 13,24).

D'après la tradition ancienne (dont Eusèbe), cet évangile fut sans doute composé durant le règne de l'empereur Claude (41-54). Mais saint Irénée dit qu'il fut mis par écrit après le départ des apôtres, leur "exode" ; ce qui laisse en suspens la date exacte. (Cf. Adv. Hae. III, Prologue).

L'Évangile selon saint Marc fut certainement rédigé avant les années 57-59, s'il est vrai qu'il fut consulté à cette date par l'auteur de l'Évangile selon saint Matthieu et par Luc à Césarée maritime, avant la rédaction de leur évangile respectif. Car ils devaient abondamment se servir de Marc, peut-être sous la forme d'une version primitive et non encore publiée.

Lieu de la composition

Le témoignage d'Eusèbe et de la tradition ancienne indiquent que cet évangile a été écrit à Rome. L'analyse interne n'infirme pas cela, mais au contraire le rend très probable.

La genèse de l'Évangile selon saint Marc, telle qu'elle est présentée par Eusèbe, paraît très vraisemblable car elle explique que cet évangile ait été placé sous le patronage de Marc, et non directement sous celui de l'apôtre Pierre, qui eût été plus prestigieux. D'autre part elle définit remarquablement le genre littéraire de ce document, ainsi que sa destination première : la lecture dans les assemblées chrétiennes, avec le blanc-seing et l'autorité de l'apôtre Pierre.

Dans cet évangile, il y a beaucoup d'aramaïsmes et de mots araméens : Talitha koum ; Ephatha ; Corban ; Bartimée ; Abba ; Rabbi ; Rabbouni ; Élôï, Élôï, lema sabachtani. Cela trahit son origine palestinienne, ainsi que celle de Pierre.

En même temps, on devine que ce livre ne fut pas écrit en Palestine, mais plutôt dans un milieu païen, vraisemblablement à Rome, comme le voulait Eusèbe. Marc éprouve le besoin d'expliquer les mœurs juives (cf. Mc 7,3-4). Il précise que les deux piécettes de la veuve, déposées dans le tronc du Temple, valent, en monnaie romaine, un quart d'as (cf. Mc 12,42). Marc emploie un certain nombre de mots grecs qui ne sont qu'une transcription du latin : le "grabat " du paralytique (cf. Mc 2,4); la "légion" du possédé (cf. Mc 5,9); le "prétoire" (cf. Mc 15,16); le "centurion" (cf. Mc 15,39). Il précise que la femme qui renvoie son mari commet également un adultère (cf. Mc 10,12): cette clause reflète le droit romain, car le droit juif n'accordait qu'au mari le droit de répudiation. Il signale que la "Parascève" des juifs correspondait à la veille du sabbat (cf. Mc 15,42).

Plan

On divise traditionnellement l'Évangile selon saint Marc en deux parties, selon l'indication qui serait donnée par l'auteur lui-même dans son titre : "Commencement de l'Évangile de Jésus, Christ, Fils de Dieu."

  • La première partie (1,1 - 9,13) montre que Jésus est le "Christ" ou Messie ;
  • la seconde partie (9,14 - 16,20) fait accéder à la notion de "Fils de Dieu".

Ce schéma peut paraître trop simple, car dès l'exorde, Jésus est présenté par Jean-Baptiste à la fois comme Christ et comme Fils de Dieu. Dans la première partie déjà, les démons eux-mêmes reconnaissent Jésus comme le Fils de Dieu (5,7) et Jésus est reconnu solennellement par le Père comme son Fils bien-aimé (9,7). Dans la seconde partie, la passion de Jésus sera, avant tout, celle du "Christ, le Fils du Béni" (14,61), et celle du "Roi" (15,2). Les deux notions bibliques de "Messie" et de "Fils de Dieu" sont d'ailleurs liées (cf. Mc 14, 61 ; Ps 2, 7 "Tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré").

On peut considérer aussi un autre modèle (construit par B. Standaert) :

  • 1. Prologue (1,1-13) Au Jourdain, Jean-Baptiste désigne Jésus comme le Messie et le Fils de Dieu.
  • 2. Narration (1,14 - 6,13) Présentation de Jésus par actions et par paroles, en Galilée et sur le lac de Tibériade. Il suscite l'étonnement.

(3-5 Argumentation : qui est Jésus ?)

  • 3. Interrogation de plus en plus pressante (6,14 - 8,26) A travers la Galilée comme en dehors de la Galilée.
  • 4. Réponse à Césarée de Philippe et à l'Hermon (8,27 - 9,13) Il est le Messie, le Fils de Dieu, mais un Messie souffrant qui demande qu'on le suive.
  • 5. Comment suivre Jésus? (9,14 - 10,52) A travers la Galilée, puis la Judée, puis la Pérée, puis en direction de Jérusalem.
  • 6. Dénouement (11,1 - 15,47) Mort de Jésus à Jérusalem.
  • 7. Epilogue (16,1-8) Résurrection de Jésus le matin de Pâques : "Il vous précède en Galilée." (16,7).
  • 8. Finale (16,9-20) Récits des apparitions aux disciples

On peut reconnaître là le septénaire familier de la littérature biblique (la huitième partie ne serait pas de la plume de Marc, cf. ci-après).

L'évangile de Marc suit aussi le plan du drame antique :

  • 1. Prologue : Jean-Baptiste vient sur scène pour présenter le drame
  • 2. Narration : exposé comparable à la narration conventionnelle d'un discours

(3-5. Argumentation : partie centrale, dénommée ainsi par les rhéteurs antiques)

  • 3. Une première section pose clairement le problème de l'identité de Jésus.
  • 4. Une deuxième section répond à la question : il est le Messie promis, le Fils de Dieu, mais en même temps le Messie souffrant qui demande qu'on le suive. C'est le nœud de l'intrigue.
  • 5. Une troisième section expose les exigences de la sequela (se mettre à la suite) du Christ.
  • 6. Dénouement tragique du drame, par la mort exemplaire du héros
  • 7. Epilogue

L'évangile s'achève comme le drame antique. Un messager du ciel, tel un deus ex machina, communique aux femmes ce qui ne peut être représenté sur scène : "Il est ressuscité." (16,6).

La finale de Marc (Mc 16,9-20)

On pense généralement que la finale de Marc (16,9-20) ne fut pas écrite par l'évangéliste. Elle ne figure pas dans maints manuscrits importants, par exemple le Vaticanus et le Sinaïticus. Elle n'est pas de son style, mais semble plutôt résumer les autres évangiles : Luc et peut-être Jean, dans leurs conclusions.

Elle n'en est pas moins canonique, et très ancienne. Peut-être de la main de Luc, qui aurait réédité l'évangile de Marc?

On a souvent supposé que la finale actuelle (qui connaît d'ailleurs une forme plus brève dans certains manuscrits) était là pour suppléer une finale accidentellement perdue. Mais, outre le peu de vraisemblance d'un tel scénario (pour un manuscrit si souvent recopié!), une fin brusque de l'évangile au verset 16,8 pourrait s'expliquer dans l'hypothèse d'une haggadah : pour le narrateur de la veillée de Pâques, devant l'assemblée chrétienne, elle serait là comme des points de suspension déférents, pour laisser la parole au président de la synaxe eucharistique, c'est-à-dire à l'évêque, pour un discours voire pour l'acte même du sacrifice de l'Eucharistie, rendant le Christ vivant corporellement présent. Mais pour la lecture privée, et pour la publication, on aura voulu combler la lacune par un bref récit des apparitions du Christ à ses disciples.

Style

Le style de Marc est très particulier : on le décrit comme primesautier, alerte, précis. Il semble aller en s'améliorant au fil de la narration : au début assez heurté, concis, rapide, il devient peu à peu plus fluide, plus coulant, tel un torrent qui deviendrait ensuite un fleuve plus tranquille. C'est que Marc était sans doute un novice : il s'est formé lui-même en composant.

Il s'attarde souvent sur des détails très concrets, qui dénotent un témoin visuel (il l'était à travers Pierre, son maître) : le coussin où dormait Jésus, à l'arrière de la barque (cf. Mc 4,38), les chaînes, les entraves dont était lié le démoniaque gérasénien, les cris qu'il poussait, les pierres dont il se frappait (cf. Mc 5,3-5), etc... Bien souvent ses confrères, Matthieu grec et Luc, ont abrégé son propos.

Ce style comporte passablement d'aramaïsme et des mots araméens qui, on l'a vu, montrent l'origine palestinienne de l'auteur.

Contenu et spécificité du "premier" évangile

En rédigeant une vie de Jésus pour proclamer le "kérygme de la foi", l'annonce de la Bonne Nouvelle, Marc a incontestablement créé un genre littéraire nouveau, qui sera repris dans les trois autres évangiles canoniques, et dans bien d'autres évangiles apocryphes (non reconnus par l'Église). Les modèles dont Marc s'est inspiré par analogie sont aussi bien judéo-hébraïques (la haggadah) que gréco-romains (de drame antique).

Dès les premiers mots de son ouvrage, Marc s'est servi d'un vocable qui sera repris par ses imitateurs: "Commencement de l' Évangile de Jésus, Christ, Fils de Dieu." (Mc 1,1)

Une simple vie de Jésus, du Baptême à la Résurrection

Selon ses premiers mots, le livre de Marc est une "Bonne Nouvelle", un évangile. C'est la Bonne Nouvelle de l'avènement du Messie et aussi la Bonne Nouvelle du salut, qui est l'enseignement proclamé par Jésus lui-même: "Jésus vint en Galilée, proclamant l'Évangile de Dieu et disant: 'Le temps est accompli et le Royaume de Dieu est tout proche'." (1,14-15).

Les disciples à leur tour devront proclamer cette Bonne Nouvelle dans le monde entier. (Cf. 13,10; 14,9; 16,15). Croire en l'évangile exige repentir (1,15) et renoncement (8,34-35), car cette bonne nouvelle ne doit pas être reçue seulement passivement. Elle exige collaboration et choix.

Le mot grec "Bonne Nouvelle" est le plus souvent traduit par le terme technique d'Évangile. L' "évangile", dans le monde ancien, désignait habituellement l'avènement d'un nouveau souverain qui était censé amener une ère de paix et de prospérité. Ici, c'est l'avènement du Roi définitif qui est proclamé : le Fils de l'homme; et l'avènement du Royaume définitif: le Royaume de Dieu.

La figure du Fils de l'homme est tout droit sortie du livre de Daniel (cf. Dn 7), du livre d'Hénoch (cf. I H 45 - 49 ; 62 - 63), du livre d'Esdras (cf. IV Esdras 13). Le Fils de l'homme est celui qui s'avance sur les nuées du ciel en présence de l'Ancien des jours ; il est l'Élu, l'Oint de Dieu, le Messie ou Christ, le Saint de Dieu, le Fils de Dieu né avant les siècles. A lui sont promis le jugement final du monde et la royauté éternelle.

Mais son royaume ne s'inaugurera pas par la violence, ou par la force des armes. Il appelle à la conversion. Il réclame l'adhésion des cœurs. Il est le règne d'un Dieu saint. Car paradoxalement ce Fils de l'homme, cet Élu, est prédestiné à un avenir douloureux, un avenir d'abaissement, avant d'entrer dans sa gloire. Pour décrire l'avènement de ce nouveau royaume, si contrasté, Marc ne fait pas de longs développements, comme dans les épîtres pauliniennes, mais raconte simplement ce qu'il sait : le ministère public de Jésus, du Jourdain à la croix. A la place de Pierre, il déploiera le kérygme (l'annonce) apostolique qui va du Baptême à la Résurrection (cf. Ac 1,21-22).

L'évangile de Marc est une "biographie" du Christ, entremêlée d'actes et de discours, de gestes, de paraboles, de miracles et de persécutions subies. Une biographie comme on savait en faire à cette époque, car le genre était très prisé. Il la fera avec application, observant les lois de la rhétorique antique, mais sans prétention. Pour le chrétien, rien n'est plus précieux que son témoignage.


Lien entre l'Évangile selon saint Marc et les autres Évangiles

"Matthieu hébreu" et Marc

L'apôtre Matthieu avait publié en hébreu, pense-t-on, des logia, dont l'existence est connue par la tradition et qui étaient sans doute plus anciens. Dès l'Antiquité on les avait désignés rétrospectivement avec le titre d'évangile, ou même d' "évangile araméen". Saint Irénée écrivait: "Ainsi Matthieu publia-t-il chez les Hébreux, dans leur propre langue, une forme écrite d'Évangile." (Adv. Hae. III, Prologue).

Les logia de l'apôtre Matthieu, la "source Q" des exégètes, ne contenaient guère, pense-t-on, que des sentences, ou des discours de Jésus, peut-être notés de son vivant, ou peu de temps après son départ de ce monde, mais très peu de récits: sûrement la guérison du serviteur d'un centurion (Mt 8,1.5-10.13 = Lc 7,1-10), et la question de Jean-Baptiste de sa prison (Mt 11,2-11.14-19 = Lc 7,18-35). Peut-être le détail des tentations du Christ (Mt 4,2-11a = Lc 4,2b-13). Ils ne formaient pas une histoire suivie de Jésus et leur plan était assez imprécis. La Passion du Sauveur n'était pas racontée.

Marc est donc bien, dans cette hypothèse, le premier auteur d'un "évangile". C'est lui qui a créé le genre "évangile", et qui en a établi la structure fondamentale, en particulier pour le récit de la Passion, qui sera largement respectée par ses successeurs.

Utilisation de Marc par "Matthieu grec" et Luc

La Théorie des deux sources, majoritairement acceptée (malgré ses difficultés!), a montré que les évangélistes Matthieu grec (peut-être le diacre Philippe) et Luc devaient beaucoup à l'Évangile selon saint Marc. Ils l'ont utilisé et incorporé dans leur propre ouvrage au point d'en faire l'ossature de leur évangile respectif.

Matthieu aurait repris, en substance, 600 versets de Marc sur 661 : la presque totalité ; et Luc au moins 350 sur 661, c'est-à-dire plus de la moitié. Au total, la teneur de Marc se retrouve presque en entier dans les deux autres synoptiques.

Le schéma organisationnel de la vie du Christ, tel que fixé par Marc, se retrouve dans Matthieu et Luc : un ministère galiléen, suivi d'une seule montée à Jérusalem pour la dernière Pâque du Christ. Matthieu et Luc ont seulement complété ce schéma, d'une part par les récits de la naissance et de l'enfance, composés symétriquement, et d'autre part par les paroles ou discours de Jésus contenus dans les logia de l'apôtre Matthieu, qu'il ne fallait surtout pas laisser perdre.

Mise à part une première partie de Marc (1,1 - 6,13) que Matthieu a assez profondément bouleversée, les deux synoptiques ont remarquablement respecté la séquence de Marc, y compris et surtout pour le récit de la Passion. Ils confirment sa chronologie pour les derniers jours ou les dernières heures de Jésus.

L'entrée messianique à Jérusalem, en débouchant de Jéricho, eut lieu avant la semaine de Pâque (cf. Mc 11,1), avant l'Onction à Béthanie qui prit place deux jours avant Pâque (cf. Mc 14,1). La dernière Cène, véritable repas pascal avec manducation de l'agneau, fut célébrée le soir de Pâque (cf. Mc 14,12). Jésus fut livré dès le lendemain aux chefs juifs (cf. Mc 14,53) puis à Pilate (cf. Mc 15,1). Et Jésus, le Vendredi saint, est resté au moins six heures en croix, de neuf heures du matin (cf. Mc 15,25) à trois heures passées de l'après-midi (cf. Mc 15,34).

Utilisation de Marc par Jean

On pourrait croire a priori que l'évangéliste - et apôtre - Jean n'a pas connu l'Évangile selon saint Marc, mais seulement celui de Luc, avec lequel il offre bien des affinités, et même des points de contact probables. La séquence des événements définie par Marc, qui se retrouve dans Jean, lui viendrait à travers la lecture de l'évangile de Luc.

Un examen plus poussé oblige à admettre que Jean a connu directement l'Évangile selon saint Marc. Ce qui n'a d'ailleurs rien de surprenant, car l'évangile de Marc était déjà ancien, et fort répandu, quand Jean se mit, dit-on (Canon de Muratori) à la demande de ses confrères survivants, à la rédaction de son propre évangile.

En Jn 6,16-21 Jean a la marche sur les eaux de Jésus de Mc 6,45-52 que Luc n'a pas.

En Jn 10,40 Jean note le séjour en Pérée de Mc 10,1 que Luc omet.

Jn 12,1-11 décrit l'Onction à Béthanie de Mc 14,3-9, que Luc également omet.

La flagellation et le couronnement d'épines de Jn 19,1-3 sont rapportés par Marc (15,15b-20) et non par Luc.

Jean est bien plus synoptique qu'on ne le dit, par rapport à ses trois confrères. Et cette synopsie lui vient directement de Marc. Jean est synoptique pour la prédication de Jean-Baptiste au Jourdain. (1,6-18), pour la première multiplication des pains et la marche sur les eaux (6,1-21), remarquablement complémentaires dans les quatre évangiles (sauf que Luc n'a pas, avons-nous dit, la marche sur les eaux), pour la profession de foi de Pierre (6,67-71), et surtout le récit des derniers jours de Jésus et de la Passion à partir de l'Onction à Béthanie (sauf ajouts, ou suppressions). Manifestement le plan de la Semaine Sainte provient de Marc et, à travers lui, du témoignage de l'apôtre Pierre. Il n'a rien d'une tradition extérieure, et indépendante, comme on le dit souvent.

De plus Jean est synoptique négativement, si l'on peut dire, car il omet sciemment bien des faits, en les supposant connus par ailleurs. Il a simplement voulu compléter, et même corriger par endroit, le canevas un peu sommaire de Marc (qui ne fut pas un témoin direct de la plupart des épisodes).


Extraits

  • Mc 1,1-3 : Commencement de l'évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu — selon ce qui est écrit dans le prophète Isaïe : Voici que j'envoie mon messager devant vous, pour vous frayer le chemin. Voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez ses sentiers.
  • Mc 14,50-52 : Et tous l'abandonnèrent et prirent la fuite. Or un jeune homme le suivait, enveloppé d'un drap sur (son corps) nu, et on l'arrêta ; mais il lâcha le drap et s'enfuit nu de leurs mains.
  • Mc 16,19-20 : Après leur avoir (ainsi) parlé, le Seigneur Jésus fut enlevé au ciel et s'assit à la droite de Dieu. Et eux s'en allèrent prêcher partout, le Seigneur travaillant avec eux et confirmant (leur) parole par les miracles qui l'accompagnaient.


Voir aussi :

Articles connexes

Bibliographie (commentaires) - ordre chronologique

  • 2005 : Philippe Léonard, «Évangile de Jésus Christ selon saint Marc», n°133 de la revue Cahiers Évangile, Cerf, sept. 2005.
  • 2001 : Guy Bonneau, «Saint Marc ; Nouvelles lectures», n°117 de la revue Cahiers Évangile, Cerf, sept. 2001.
  • 1997 : Simon Légasse, L'Évangile de Marc, Cerf, Coll. «Lectio Divina / Commentaires» n°5, Paris. Tome 1 ISBN 2-204-05588-3 ; Tome 2 ISBN 2-204-05588-5
Deux gros volumes, avec une traduction de tout l'évangile.
  • 1997 : Benoît Standaert, L'Évangile selon Marc : commentaire, 2Modèle:Ème éd., rev. et augm, Cerf, Coll. «Lire la Bible» n°61 bis, Paris. ISBN 2-204-05577-8 (1Modèle:Ère éd.: 1983)
  • 1996 : Paul Lamarche, Évangile de Marc. Commentaire, Gabalda, Coll. «Études bibliques, nouvelle série» n° 33, Paris. ISBN 2-85021-093-5
  • 1994 : Marie-Émile Boismard, L'Évangile de Marc, sa préhistoire, Coll. «Études Bibliques, nouvelle série» n°26. ISBN 2-85021-075-7
Contient une hypothétique reconstruction du "proto-Marc", par un grand spécialiste de la question, texte grec et trad.
  • 1978 : Benoît Standaert, L'Évangile selon Marc : composition et genre littéraire, Druk Stiching Studenpers, Nimègue (Pays-bas).
Publication de thèse.
  • 1973 : Jean Delorme, «Lecture de l'Évangile selon saint Marc», n°1/2 de la revue Cahiers Évangile, Cerf.
    Ce numéro double comporte une table des textes étudiés avec la mention de leur utilisation liturgique de l'année B (celle où l'évangile selon saint Marc fournit les évangiles de chaque dimanche)
  • 1947 : P. Marie-Joseph Lagrange, Évangile selon saint Marc..., Gabalda, Coll. «Études Bibliques», Paris.

Liens externes

Source: http://fr.wikikto.eu/index.php/%C3%89vangile_selon_saint_Marc