Prêtre

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La tradition la plus ancienne de l’Église parle d'un service appelé en latin presbyterium, organisé autour de l'évêque, qui est appelé dans le Nouveau Testament, presbyter, terme qui désigne l’ancien chargé de diriger une communauté ecclésiastique locale. Car le sens littéral de ce terme grec (en grec: πρεσβύτερος / presbyteros) signifie « ancien, homme âgé », et il n'existe en fait aucun ordre appelé prêtrise[1]. Dans son usage moderne, presbyter n'a plus l'acception d’évêque, mais il est devenu synonyme de prêtre.

Histoire

A l'origine, une fonction non sacerdotale

Les presbytres n'exerçaient pas à l'origine une prêtrise, au sens sacerdotal du terme, mais n'étaient que les conseillers de l'évêque, comme l'explique très clairement l'extrait suivant [2] :
„Le vocabulaire du Nouveau Testament ne permet pas de reconstituer avec précision l'évolution qui a conduit à la distinction entre presbytérat et épiscopat. Elle ne devient nette que vers 150. Depuis lors, les presbytres apparaissent comme constituant un collège, subordonné à l'évêque unique, avec lequel ils collaborent étroitement. En revanche, le même vocabulaire révèle que le Nouveau Testament ne conçoit pas le presbytérat (ou l'épiscopat) dans la ligne du sacerdoce, ce que les traductions françaises ne peuvent rendre, puisqu'elles ne disposent que de l'unique mot « prêtre » pour traduire deux termes bien distincts en grec : d'une part, grec: ἱερεύς, hiéreus (sacrificateur cultuel, médiateur entre Dieu et les hommes) et d'autre part, grec: πρεσβύτερος, presbutéros, (ancien de la communauté, chargé de présider, sans connotation sacerdotale).
L'unique sacerdoce que le Nouveau Testament connaisse est celui du Christ : l’Épître aux Hébreux présente explicitement sa mort comme un sacrifice, dont lui-même a été le grand prêtre, et par lequel il a mis fin, une fois pour toutes, à tous les sacrifices et à tous les sacerdoces, devenant ainsi l'unique médiateur entre Dieu et les hommes (
Première Épître à Timothée, 2, 5-6). Aussi le Nouveau Testament évite-t-il systématiquement le vocabulaire sacerdotal pour qualifier les nombreux ministères qu'il mentionne ; tout au plus l'emploie-t-il, occasionnellement, pour désigner collectivement le peuple chrétien (Première Épître de Pierre, 2, 5 et 9 ; Apocalypse, 1, 6 ; 5, 10 ; 20, 6), mais c'est au sens très large d'une vie de justice et sainteté, qui se déploie devant Dieu et devant les hommes et qui n'implique pas que chacun soit prêtre.”
(Hervé LEGRAND, « PRÊTRE, christianisme  », Encyclopædia Universalis)

Du presbytre au prêtre

L’organisation des églises chrétiennes de Palestine était, au tout début, semblable à celle de la synagogue juive, qui était administrée par un conseil des anciens (presbyteroi). Dans les Actes 11:30 et 15:22, on voit comment ce système collégial gouvernait l’Église de Jérusalem, et dans Actes 14:23 on voit Saint Paul ordonner des anciens dans les églises qu’il fonde. Au début, il semble que ces presbyters (ou presbytres) aient été les mêmes que les superviseurs (en grec: ἐπίσκοποι / épiskopoi), c'est-à-dire des évêques), comme l’indiquent les Actes 20:17 et l'Épître à Tite 1:5,7 et les termes étaient interchangeables.

Peu de temps après la période du Nouveau Testament, après la mort des Apôtres, dans l’usage des deux termes on commence à faire la différence entre les deux termes, ce qui mène à l’apparition des deux fonctions distinctes, celles de l’évêque et du prêtre. L’évêque était perçu notamment comme le président du conseil des prêtres (presbytéroi), et c’est ainsi qu’il arrive à se distinguer par le respect qui lui était dû et par ses prérogatives par rapport aux presbytéroi. On commence à considérer que ceux-ci détenaient leur autorité de la délégation de l’évêque. La distinction entre le prêtre et l’évêque commence à se faire assez tôt après la période apostolique : on la retrouve dans les écrits, datant du IIe siècle, de Saint Ignace d'Antioche qui, dans l’ensemble de ses œuvres, emploie les deux termes de manière à désigner deux fonctions différentes (à côté de celle du diacre).

Au début, chaque communauté locale avait son propre évêque. Plus tard, lorsque le nombre des fidèles s’accrut, l’évêque ne s’occupa plus des paroisses de manière directe. L’évêque d’une grande cité nommait un prêtre, qui agissait par délégation épiscopale, pour mener le troupeau de chaque communauté.

Ordination et Mariage

Le prêtre est investi de son pouvoir pastoral par un évêque, à travers le sacrement de l’ordination. Durant cette ordination, une prière demande le don de l'Esprit Saint afin que le nouvel ordonné « serve l'Autel sans condamnation et prêche l’Évangile du Royaume » [3]. Mais l’ordination requiert aussi le consentement du peuple de Dieu : à un moment donné, durant le service d’ordination, la communauté ratifie l’ordination du candidat en criant : Axios ! (en grec, Il est digne !)

Dans la tradition de l’Église indivise, le mariage des prêtres a été possible dès les origines du christianisme, comme le prouve la Première Épître de Paul à Timothée (3, 2-4) où on lit : « Il faut que l'évêque soit irréprochable, mari d'une seule femme. » La Règle Apostolique 26 stipule qu'est reconnue comme parfaitement légitime l'ordination de personnes mariées, mais le mariage est interdit après l'ordination : cette interdiction, fondée sur des considérations pastorales, reflète l'exigence que les membres du clergé soient des hommes stables et en pleine maturité spirituelle. La règle 14 du 6e Concile œcuménique impose comme âge canonique l'âge de trente ans pour l'ordination des prêtres, afin de rappeler ce principe de maturité spirituelle. Saint Cyrille d'Alexandrie dans le canon 4, insiste sur les deux voies entre lesquelles celui qui est appelé au ministère ecclésiastique doit choisir : soit fonder une famille et mener une vie familiale exemplaire, soit accepter le célibat dans un esprit de renoncement ascétique [4]. Il existe donc, dans l’Église orthodoxe, deux types de prêtres : ceux qui sont mariés et ceux qui sont célibataires. Un homme marié peut être ordonné prêtre, à condition que, tant pour lui que pour sa femme, ceci fût leur premier mariage. Le Canon Apostolique 17 et la doctrine chrétienne du mariage exigent cette absolue monogamie. Si la femme d'un prêtre meurt, il ne doit plus se marier : l’Église ne reconnaît en effet la valeur sacramentelle qu'à un seul mariage, et les prêtres sont tenus de pratiquer eux-mêmes la règle qu'ils enseignent aux autres ; si un prêtre veuf se remarie, il ne pourra donc plus exercer son ministère. Si un homme célibataire est ordonné, il doit demeurer célibataire jusqu’à sa mort et sera le plus souvent moine. Un prêtre-moine s’appelle hiéromoine.

Ministère

L’Église enseigne que le clergé doit faire de son mieux pour parachever la grâce qui lui est donnée par le don de la "chirotonie" (imposition des mains). Mais l’Église enseigne également que la réalité et l’efficacité des Sacrements de l’Église, tels qu’ils sont mis en œuvre par les prêtres, ne dépendent pas de leur vertu personnelle, mais de la présence du Christ qui agit dans son Église par l’Esprit Saint. Comme pour les évêques, c’est le Christ qui, à travers les ministres qu’il a choisis, agit pour enseigner, paître, pardonner et guérir. C’est le Christ qui pardonne les péchés et qui guérit les maladies physiques, psychiques et spirituelles de l’humanité. Le prêtre est une image du Christ.

En règle générale, les prêtres exercent la fonction de pasteurs des paroisses, une charge qui dans l’Église primitive appartenait aux évêques. Ils sont les recteurs des communautés chrétiennes locales. En tant que successeurs des apôtres, les évêques et les prêtres sont chargés de la prédication : leur ministère consiste à proclamer l’Évangile et à enseigner la foi. C'est pourquoi le Canon Apostolique LVIII rappelle avec sévérité la nécessité pour les membres du clergé de prêcher, sous peine d'excommunication et de déposition. La prédication et la catéchèse constituent en effet deux des fonctions essentielles du ministère sacerdotal des prêtres. Ils président la célébration liturgique et ils enseignent, prêchent, conseillent et exercent le ministère de la guérison et du pardon des péchés.

Puisque les prêtres sont désignés par leur évêque et qu’ils appartiennent à des communautés spécifiques, ils n’ont point d’autorité pour célébrer des services divins en dehors de leur paroisse et du diocèse de leur évêque. Sur la table de l’autel de l’église de chaque paroisse se trouve un tissu appelé l’antimension, signé par l’évêque local, qui signifie l’autorisation qu’il donne à la communauté de se réunir pour célébrer les services divins et pour manifester l’Église locale. Sans l’antimension, il ne peut y avoir de célébration liturgique légitime.

Usage moderne

Le prêtre est appelé Père (P.) - terme utilisé dans toutes le langues -, à cause de la fonction de pasteur et "père" de la communauté.

Pour désigner un prêtre de manière formelle, il sera appelé le Révérend Père [Nom] . Pour l’archiprêtre et le protopresbyter, de même que pour un archimandrite, supérieurs en rang et responsabilité ecclésiale, on utilisera la formule Très Révérend Père ou, selon le cas, Très Révérend Archimandrite. De manière informelle, ils seront tous désignés par l’appellatif Père avec le nom ou le prénom de la personne visée, selon le contexte et le degré de familiarité.

Références

  1. Mgr. Stéphanos, Ministères et charismes dans l’Église orthodoxe, Desclée de Brouwer, 1988, p. 33.
  2. Lire cet extrait en ligne.
  3. Mgr. Stéphanos, Ministères et charismes dans l’Église orthodoxe, Desclée de Brouwer, 1988, p. 45.
  4. Mgr. Stéphanos, Ministères et charismes dans l’Église orthodoxe, Desclée de Brouwer, 1988, p. 105 à 109.

Sources

  • en: Liddell & Scott, An Intermediate Greek-English Lexicon, pp. 301, 668
  • en: The Compact Edition of the Oxford English Dictionary, p. 2297
  • en: The Oxford Dictionary of the Christian Church (3rd ed.), p. 1322

Liens externes