Divine Liturgie

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Office de la Préparation
Proscomidie
Objets Liturgiques
Vêtement
Synaxe de la Parole
Grande Litanie
Antiennes
Petite Entrée
Tropaire
Hymne du Trisagion
Apôtre
Évangile
Homélie
Litanie de Fervente Supplication
Litanie des catéchumènes
Synaxe Eucharistique
Hymne des Chérubins
Grande Entrée
Litanie de complétion
Credo de Nicée-Constantinople
Anaphore
Épiclèse
Mégalynaire
Prière du Seigneur
Communion
Renvoi
Antidoron
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La Divine Liturgie est le principal service religieux de l’ Église consistant en la transformation des Saints Dons offerts en corps et sang divins. Les prières, les psalmodies, les lectures de l'office sont une préparation à la réception de ces Saints Dons.

Les Liturgies célébrées le plus souvent sont la Liturgie de Saint Jean Chrysostome, la Liturgie de Saint Basile le Grand et la Liturgie des Saints Dons présanctifiés, mais il existe aussi d’autres Liturgies comme la Liturgie de Saint Jacques, la Liturgie de Saint Marc, la Liturgie de Saint Tikhon de Moscou.

La Divine Liturgie est une célébration eucharistique. Elle est structurée en deux grandes parties: la Liturgie des Catéchumènes, connue aussi comme la Liturgie de la Parole, où sont proclamées et expliquées les Écritures Saintes, et la Liturgie des Fidèles, connue aussi comme la Liturgie eucharistique, où le pain et le vin sont offerts et consacrés (sanctifiés). L’Église enseigne que les Dons deviennent le vrai Corps et le vrai Sang du Christ pendant la Liturgie, mais n’a pas institué de formule dogmatique quant à la manière dont ils sont transformés. La Prothésis (ou Proskomédie), le service de préparation des Dons est souvent considérée une troisième partie du service, précédant la Liturgie proprement-dite.

Préparation

Avant le début de la Divine Liturgie, le prêtre et le diacre (s’il y en a un qui est présent) commencent à préparer les dons de pain et de vin a utiliser pour le service. Cette préparation est considérable. Il ne s’agit pas tout simplement de mettre à part le pain et le vin: il y a tout un rituel élaboré, d’une grande complexité symbolique. Alors que ses directions générales sont similaires pour la plupart des Églises orthodoxes, des différences peuvent apparaître, en fonction du typicon en usage dans une juridiction ou une autre.

Pendant la Proscomédie, le prêtre découpe un carré, appelé l’Agneau, à l'intérieur des petits pains fabriqués spécifiquement pour la Liturgie (les prosphora). C’est ce carré qui sera consacré, pendant la Liturgie des Fidèles, pour devenir le Corps du Christ. Le prêtre découpe aussi de petits morceaux des prosphora pour les placer sur la patène (diskos) pour la commémoration de la Mère de Dieu, des différents Saints et des fidèles vivants et décédés. Le reste du pain est béni et distribué aux fidèles de la paroisse et aux visiteurs après le service: ces morceaux de pain distribués après la fin du service sont appelés antidoron.

Pendant la Proscomédie, le prêtre bénit aussi le vin et l’eau qui seront mis dans le calice. De l’eau chaude sera ajoutée dans le calice après l’Épiclèse.

Bien sûr, les dons sont encensés à plusieurs reprises pendant la proskomédie. La fin de la prothésis mène directement au commencement de la Divine Liturgie.

Liturgie des Catéchumènes

Prélude

La Divine Liturgie commence par l’exclamation solennelle du prêtre, devant l'autel: « Béni soit le Royaume du Père et du Fils et du Saint Esprit, maintenant et pour toujours et pour les siècles des siècles!» L’assemblée des fidèles répond: « Amen ».

Cette bénédiction, commente Alexandre Schmemann, rappelle que nous venons à la Divine Liturgie pour être introduit dans le Royaume de Dieu, non comme une réalité seulement à venir, mais comme se révélant dès maintenant dans la Liturgie : "Que signifie bénir le Règne ? C'est le reconnaître et le confesser comme valeur ultime et suprême, comme "la vie de la vie". C'est le proclamer comme la fin du Sacrement qui va commencer, pèlerinage, élévation, entrée. C'est concentrer son attention, son intelligence, son coeur, son âme, toute sa vie sur ce qui, depuis toujours et à jamais, est "le seul nécessaire". Enfin, c'est confesser que dès maintenant, dès "ce monde", il est possible d'y communier, d'entrer dans sa lumière, sa vérité et sa joie. Chaque fois que les chrétiens "s'assemblent en Eglise", ils témoignent que le Christ est le Roi et le Seigneur, que déjà son Royaume est ouvert et donné, que déjà la vie nouvelle et immortelle est commencée... Voilà pourquoi la Liturgie commence par cette confession et cette glorification solennelles du Roi qui vient maintenant, mais qui demeure toujours et qui règne dans les siècles des siècles. (...) L'assemblée répond "Amen !" Lon traduit habituellement ce terme par : qu'il en soit ainsi !, alors que son sens et sa résonance sont plus forts. L'Amen signifie non seulement accord, mais réception active : "Oui, cela est ainsi et qu'il en soit ainsi !"[1]

C'est en effet par la glorification de la Sainte Trinité qu'il convient de commencer, avant de présenter nos demandes et supplications ou de confesser ses erreurs. En commençant ainsi, l'homme met de côté ses soucis mondains pour glorifier Dieu : il se met d'emblée en présence de sa transcendance. D'ailleurs, dans l'entretien avec Dieu, affirme St Nicolas Cabasilas[2] , l'homme commence par sentir la transcendance, la grandeur de Dieu, saisi d'admiration ; c'est ensuite qu'il apprend sa Bonté et son amour des hommes ; c'est son amour qui éveille en nous le désir de confesser nos erreurs ; et c'est ensuite que vient la confiance dans la demande, comprenant que bons envers nous alors que nous étions pécheurs, il ne peut que l'être d'autant plus quand nous nous sommes convertis vers Lui. La Liturgie suit donc cet ordre, de la prise de conscience de la transcendance de Dieu, aux supplications et à la confession de ses erreurs.

Grande Litanie

"Après la confession et la glorification du Règne, le moment est venu de la "prière commune et unanime"."[3] Le diacre (ou le prêtre, s’il n’y a pas de diacre) continue avec la Grande Litanie, ainsi appelée non seulement parce qu’elle est plus longue mais aussi parce que la plupart de ses litanies et supplications concernent tous les besoins du monde: on prie pour la paix et le salut, pour l’Église, ses évêques, ses fidèles, pour les prisonniers, pour la santé et le salut, pour la libération de tout trouble et de toute nécessité. Il s'agit d'une prière d'intercession qui est participation à la prière même du Christ puisqu'il est le médiateur entre Dieu et les hommes.

Le prêtre par une telle introduction à la doxologie invite tout le peuple à participer à la prière. A chacune des demandes, les fidèles expriment cette participation en répondant : "Kyrie eleison" ou "Seigneur miséricorde !", faisant ainsi preuve d'humilité devant Dieu.

La Grande Litanie est aussi appelée Litanie de Paix, car elle commence par l'invitation : "En paix, prions le Seigneur." De la sorte, la liturgie nous apprend comment effectuer une prière de demande : il faut d'abord prier en paix. Cette paix nécessite deux conditions : être reconnaissant envers Dieu pour toutes choses et avoir la conscience pure grâce à la Confession. Il nous faut donc être préparés à la prière pour la Divine Liturgie, afin qu'elle ne soit pas vaine.

La première demande est d'ailleurs "pour la paix qui vient d'En-Haut et pour le salut de nos âmes", puis "pour la paix du monde entier"... Cette paix d'En-Haut nous est donnée, mais nous prions pour la recevoir activement. Cette "paix d'En-Haut", c'est le seul nécessaire, le Royaume de Dieu : c'est pourquoi elle est demandée en premier, avant toute chose, selon la recommandation évangélique : "Cherchez avant tout le Royaume de Dieu et le reste vous sera donné par surcroît" (Matthieu, VI, 33). C'est seulement si cette paix est acquise que la deuxième demande peut être exaucée : la paix du monde. Le Royaume de Dieu est le levain qui fait lever la pâte selon l'Evangile et les chrétiens sont le "sel de la terre". Il faut que ce sel soit conservé, car s'il perd sa saveur par quoi le salera-t-on ? (Matthieu, VI, 13) C'est pourquoi la prière continue pour la "stabilité des Sainte Eglises", afin que l'Eglise, c'est-à-dire l'assemblée des chrétiens demeure "le sel et la lumière du monde". Nous prions alors "pour ce saint temple et ceux qui y entrent avec foi, piété et crainte de Dieu" : cette prière nous rappelle les conditions de notre participation vivante à la prière eucharistique : entrer avec foi, piété et crainte de Dieu et non par habitude, avec distraction. Nous prions ensuite pour les membres de l'Eglise et pour le monde entier, la nature et les hommes, nous rappelant la tâche de l'Eglise : non pas seulement prier pour nos petits besoins, mais intercéder pour me monde entier.

La Grande Litanie finit, comme la plupart des litanies, par une évocation du témoignage de la Mère de Dieu et des Saints. À la lumière de ces puissants témoins, les fidèles sont chargés à offrir leur vie à Jésus Christ notre Seigneur :

"Faisons mémoire de notre Dame, la toute sainte, immaculée, bénie par dessus tout et glorieuse Mère de Dieu et toujours vierge Marie, ainsi que de tous les saints, et confions-nous, nous-mêmes, les uns les autres et toute notre vie au Christ Dieu."

Avec l'aide et l'intercession de la Mère de Dieu, dans l'unité de la foi, nous nous confions à Dieu. Nous ne demandons pas seulement d'être défendus, protégés par Dieu: nous faisons de Dieu même notre vie. Nous ne nous confions pas seulement nous-mêmes, mais ensemble, "les uns les autres", c'est-à-dire en église.

Le prêtre fait alors la prière conclusive.

Les antiennes

Suivent trois antiennes (antiphon), différentes selon le jour et en fonction de la juridiction. Les deux premières antiennes sont suivies par une brève litanie et une prière. Lors de la Divine Liturgie de St Jean Chrysostome, le dimanche, la troisième antienne chante les Béatitudes.

Synaxe de la Parole

Petite Entrée

La troisième antienne, le chant des Béatitudes, est suivie par la Petite Entrée. Après trois métanies, le diacre et le prêtre, portant l'Evangéliaire, contournent l'autel par la droite et sortent par la porte nord (à gauche) du sanctuaire, précédés de cierges allumés. Ils s'avancent jusque devant les portes saintes et se tiennent la tête inclinée. Le diacre invite alors le prêtre à dire la prière de l'entrée.

Comme la Grande Entrée avec les Saints Dons (cf. ci-dessous), la Petite Entrée symbolise l'apparition du Christ dans le monde. Lors de la Petite Entrée, l’Évangéliaire tenu par le diacre ou le prêtre figure le Christ et le début de son ministère public.

Alexandre Schmemann[4] insiste sur le fait que l'interprétation symbolique de la Divine Liturgie ne doit pas nous amener à y voir une "figuration", en opposant cette figuration au réel. Le Christ est la Parole de Dieu présente par l'Evangile, et c'est à sa présence réelle qu'il faut s'éveiller pendant la Liturgie. La Liturgie n'est donc pas quelque chose dont il faudrait comprendre intellectuellement les symboles, mais une expérience vivante par la communion dans l'Esprit Saint.

C'est par cette petite entrée que commençait auparavant la Divine Liturgie : il s'agit du début d'une montée, d'une entrée, d'une élévation des fidèles dans le Royaume de Dieu, non seulement comme siècle à venir, mais comme réalité déjà présente, se révélant à nous par la Divine Liturgie. Il s'agit d'entrer en présence de Dieu, de se tenir devant Lui et d'être sanctifié par sa Présence.

Le Choeur chante alors: «Venez, adorons et prosternons-nous devant le Christ ! Sauve-nous, ô Fils de Dieu, nous Te chantons : Alléluia! ». L’appellation « Fils de Dieu » est en général suivie par la formule ajoutée: « qui es ressuscité des morts » le dimanche ou « merveilleux dans Tes saints » les jours ordinaires.

Tropaires du jour, kontakion

Suivent les tropaires et les kontakia de la journée, de la période liturgique et de l’église. Étant pleinement entrés, liturgiquement, dans l’église et réunis autour de la Parole de Dieu, l’assemblée chante l’hymne du Trisagion à la Sainte Trinité : «Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous ! » Ce cantique céleste atteste que le Ciel et la terre sont réconciliés et que nous nous élevons au Ciel en participant à la Liturgie.

Lectures

La proclamation des Écritures est annoncée par le prokimenon, un psaume ou le refrain d’un cantique chanté en style responsorial. Puis, un lecteur proclame la lecture apostolique de l’une des Épîtres ou des Actes des Apôtres. Cette lecture devrait être chantée, mais, par oikonomia, en fonction des conditions locales, elle peut aussi être tout simplement lue à haute voix (dans certaines traditions, le lecteur commence à entonner la lecture apostolique à voix très basse et continue d’une voix de plus en plus haute : c’est une forme d’évocation de la manière dont l’Église des premiers siècles est remontée des catacombes). Un triple alléluia est chanté, en lui ajoutant des vers, comme pour le prokimenon. Cet Alléluia annonce la lecture de l’Évangile : c'est un chant de joie né de la présence de Dieu.

Le prêtre invite les fidèles à être attentifs : "Sagesse ! Debout ! Ecoutons le Saint Evangile ! Paix à tous !" Il indique ainsi l'attitude convenable pour recevoir la Parole de Dieu : par l'attitude corporelle (debout), par l'attention de l'esprit et la paix du coeur. Cette paix est la présence du Christ dans notre coeur, c'est Lui qu'il s'agit d'accueillir en écoutant l'Evangile. Il répète de nouveau ""Soyons attentif", afin de nous inviter à lutter contre la distraction des pensées (de même que le terme "debout" peut signifier : soyez prêts à lutter, soyez vigilants). Après quoi celui-là (ou le diacre) entonne le passage de l’Évangile.

Après l’Évangile, le prêtre fera le plus souvent une homélie, un sermon sur l’Écriture, la saison, sur la fête ou commémoration du jour. L’homélie peut être prononcée aussi après la Communion ou même après la conclusion de la Liturgie.

Liturgie de la Supplication Fervente

Le service continue avec la Litanie de la Supplication Fervente, signalée par la triple répétition, marque d’insistance, du «Seigneur, prends pitié! » ou "Kyrie Eleison". Cette prière intercède principalement pour le clergé, ceux qui servent l'Etat et le peuple. Certains jours, celle-ci est suivie par la Litanie pour les morts.

Liturgie des Catéchumènes

La Liturgie des Catéchumènes est conclue par une litanie qui leur est consacrée, où l’on prie pour la continuation de la croissance du catéchumène dans la foi, jusqu’au jour de leur baptême. Alors que le plus souvent il n’y aura plus de catéchumènes présents, cette litanie demeure dans la Liturgie, pour nous rappeler la fondation de l’Église en tant que mission dans le monde. Comme le dit Alexandre Schmemann : "Du point de vue historique, ces prières ont certes été introduites non seulement quand l'Eglise incluait le catéchuménat, mais encore quand elle consédérait qu'elle était tournée vers le monde afin de le convertir au Christ, quand elle voyait dans le monde l'objet de sa mission. (...) Ainsi, les prières pour les catéchumènes, tout en conservant leur sens immédiat, doivent représenter pour nous un rappels et un jugement permanents : que faites-vous, que fais-tu, toi, que fait votre Eglise pour la mission du Christ sur la terre ?"[5]

Liturgie des Fidèles

La Grande Entrée

Pendant que l’assemblée commence à chanter l’Hymne des Chérubins, a lieu la Grande Entrée par laquelle on apporte les Saints Dons à l'autel. Le prêtre et le diacre prennent les Saints Dons de la Table de la Proscomédie, sortent du sanctuaire par la porte nord (à gauche), pour y entrer par les Portes Royales et amener les Saints Dons à l'autel.

Avant la Grande Entrée, les célébrants vont à la Table de la Proscomédie, où le prêtre présente la patène (diskos) au diacre et prend le calice lui-même. Le diacre va devant le prêtre et ils sortent de l’Autel par la porte nord de l’iconostase (s’il n’y a pas de diacre, le prêtre célébrant porte à lui seul la patène et le calice). Le clergé porte les Dons en procession jusqu'aux Portes Royales, les portes centrales de l’iconostase, pendant que le diacre demande aux fidèles de faire attention, en suppliant Dieu de se souvenir de tout le monde dans son royaume. Pendant que les Dons sont portés en procession solennelle par les Saintes Portes, l’assemblée des fidèles conclut l’Hymne des Chérubins.

Ce rite a une utilité pratique : apporter les Saints Dons à l'autel, avec la révérence qui leur convient. Mais il symbolise aussi l'entrée de Jésus Christ à Jérusalem, célébré lors du Dimanche des Rameaux, inaugurant sa Passion et son sacrifice dont l'eucharistie fait mémoire.

Le prêtre bénit les fidèles, et le diacre exclame par la suite: « Les portes! Les portes! » Cette fameuse exclamation marquait autrefois le moment du service où les portes de l’église étaient fermées, pour n’y laisser dedans que les chrétiens baptisés initiés au Mystère. Avec le passage du temps, on a commencé à permettre aux visiteurs de rester dans l’église après ce moment, mais la solennité de ce qui suit est toujours rappelée par ces mots. Saint Nicolas Cabasilas affirme que cette exclamation invite aussi les fidèles (alors que l'on ferme les portes extérieures, qu'on rejette toute distraction) à ouvrir les portes intérieures des sens, c'est-à-dire d'être pleinement attentif.[6]

L’Église fait alors le témoignage de sa foi commune de tout ce qu'il lui a été enseigné par la Révélation, en récitant le Credo. L’appellation liturgique du Credo de Nicée et Constantinople est «Le symbole de la foi », terme qui indique son importance pour les premiers chrétiens et pour établir si une personne qui déclare appartenir à l’Église était vraiment orthodoxe.

L'Anaphore

Après le credo, le prêtre commence l’Anaphore, la grande prière eucharistique sur les Dons. Les deux principales anaphores en usage dans l’Église Orthodoxe sont celle de St. Jean Chrysostome et celle de St. Basile le Grand. Dans ces deux Liturgies, l'Anaphore commence par l'invitation du prêtre : "Tenons-nous bien ! Tenons-nous avec crainte ! Soyons attentif à offrir en paix la sainte oblation !" A quoi les fidèles répondent : "L'offrande de paix, le sacrifice de louange", rappelant ainsi que l'on ne doit pas se présenter à l'autel sans s'être réconcilié avec son prochain, sans être en paix, selon la parole évangélique : "Je veux la miséricorde et non le sacrifice" (Matthieu, 9:13 cf. aussi le psaume 50).

Après une bénédiction ("Que la grâce de notre Seigneur..."), suit l'ecphonèse : "élevons nos coeurs !" Car "l'Eucharistie ne s'accomplit pas sur la terre, mais au ciel"[7] Ce Ciel est au-dedans de nous. "Si nous pouvons "tenir en-haut notre coeur", c'est que cet en-haut, ce ciel se trouve en nous et parmi nous (...)."[8] C'est une élévation de ce qui est terrestre comme retour à notre patrie originelle. "Voilà pourquoi l'exhortation : "Elevons nos coeurs" résonne-t-elle comme un dernier et solennel avertissement. "Craignons de rester sur terre" (St Jean Chrysostome). Libre à nous de rester en bas, de demeurer insensible à l'essor vers le haut, de ne pas assumer cette montée effectivement difficile. Mais celui qui reste à terre ne prend pas place à l'Eucharistie céleste. Notre présence même y devient alors notre condamnation."[9] Il s'agit de s'interroger face à ce dernier appel : notre coeur est-il tourner vers le Seigneur, vers le seul nécessaire ? "La où est ton trésor, là aussi sera ton coeur" (Matthieu, VI, 21).

La prière qui suit est une action de grâce. En rendant grâce à Dieu, elle révèle la place de l'homme comme objet d'un amour infini de Dieu : "c'est Toi qui, du non être, nous as amenés à l'existence. Tu nous as révélé après notre chute, et tu n'as cessé de tout faire pour nous ramener au ciel et nous faire le don de ton Royaume à venir." Cette prière nous rappelle que l'état de péché dans lequel nous sommes n'est pas notre état normal (nous sommes tombés), que nous n'y sommes pas destinés, qu'il ne faut pas s'y arrêter (cf. psaume 1) et que nous sommes appelés à entrer dans le Royaume de Dieu. "Le péché est une déchéance de l'homme non seulement par rapport à Dieu mais aussi par rapport à lui-même, à sa vraie nature, à la dignité de l'élection à laquelle Dieu nous a destinés."[10]

Nous faisons alors mémoire de la Sainte Cène. Cette commémoration de la Sainte Cène n'est pas seulement une référence à l'institution du sacrement, comme à un acte passé, comme cause lointaine. C'est l'institution de l'Eglise elle-même qui est commémorée et le sacrement est son actualisation. La Sainte Cène est la révélation du Christ, la participation à sa table dans son Royaume (Luc, XXII, 29-30). La Liturgie est une montée vers ce moment.

"Lorsqu'en nous approchant de la communion, nous prions : "A ta Cène mystique, Fils de Dieu, reçois-moi aujourd'hui", cette identification entre ce qui s'effectue aujourd'hui et ce qui avait été accompli alors est exactement réelle, car nous sommes rassemblés aujourd'hui dans le même Royaume, à la même Cène que le Christ avait alors effectuée, la nuit de la fête, avec ceux qu'il avait aimé à l'extrême. "Aimés jusqu'à l'extrême" (Jean, XIII, 1). Dans l'expérience eucharistique comme dans l'Evangile, la Cène mystique est l'extrême (telos), c'est-à-dire l'achèvement de l'amour du Christ, de celui qui fait la substance de son ministère, de sa prédication, de ses miracles et par lequel il se donne maintenant lui-même comme l'Amour même."[11] La Cène mystique est "réalisation de la fin, car elle est la manifestation du Royaume de l'Amour pour lequel le monde avait été créé"[12]. Le sacrifice du Christ au Golgotha n'est pas préfiguré par la Cène, il en est la conséquence complète.[13] C'est pourquoi la commémoration continue par "tout ce qui a été fait pour nous : la croix, le tombeau, la résurrection au troisième jour, l'ascension aux cieux, le trône à la droite, le second et glorieux avènement."

Tout cela appartient à la même anaphore : c'est-à-dire au souvenir de l'action d'amour de Dieu envers les hommes et à l'action de grâce en réponse à cet amour. L'homme prend conscience de sa dette envers Dieu et que tout don qu'il offre à Dieu vient de Dieu : "pour tout cela et en tout cela, t'offrant ce qui est à toi et que nous avons reçu de toi."

Le prêtre invoque alors l’Esprit Saint, en demandant qu’Il descende sur les Dons. On dit parfois que cette invocation de l’Esprit Saint, appelée l’Épiclèse serait le moment spécifique où les dons de pain et de vin sont transformés en Corps et Sang du Christ, mais les liturgistes orthodoxes ne sont pas tous d’accord avec l'idée de désigner un moment précis pour la transformation, affirmant que la liturgie en entier participe à cette transformation. Cependant, après la prière de l’épiclèse, les prières suivantes du service liturgique traitent les Dons comme consacrés et transformés.

Après l’invocation de l’Esprit Saint et la consécration des Dons, le prêtre fait la commémoration des Saints, à commencer avec la Mère de Dieu. L’assemblée des fidèles commence à chanter l’hymne traditionnel en l’honneur de la Vierge : « Il est digne en vérité de te célébrer, ô Mère de Dieu, bienheureuse et très pure Mère de notre Dieu, Toi plus vénérable que les Chérubins et plus glorieuse incomparablement que les Séraphins, qui sans corruption enfantas Dieu le Verbe, Toi qui es véritablement la Mère de Dieu, nous te glorifions ».

Le prêtre prie pour que l’évêque au nom duquel il célèbre la Liturgie se maintienne dans la foi orthodoxe, qu’il soit préservé en bonne santé et pour longtemps.

Communion

Suit une litanie : "Ayant fait mémoire de tous les saints, encore et sans cesse, en paix prions le Seigneur." Puis la récitation du Notre Père. Se dit ensuite une prière la tête inclinée.

Le prêtre élève ensuite les Dons consacrés, en exclamant: « Ce qui est saint pour les saints ! », ce qui montre que la communion ne saurait être donnée qu'à ceux qui sont préparés et dans l'Eglise. Les fidèles répondent alors : «Un [seul] est Saint, Un [seul] est le Seigneur, Jésus Christ, pour la gloire de Dieu le Père, amen ». Les fidèles reconnaissent ainsi que Dieu seul est la source de la sainteté, surtout dans le cas de notre participation à cette communion. Si nous sommes saints, c'est par la participation à la sainteté du Christ.

Les fidèles orthodoxes communient en recevant les deux espèces (le pain immergé dans le vin), à l’aide d’une cuillère, suivant une tradition qui remonte au quatrième siècle.

Après avoir reçu le Corps et le Sang du Sauveur, ils prennent une petite portion de pain béni, l’antidoron (qui, en principe, provient du même pain – prosphora – dont l’Agneau a été découpé). L’Antidoron ne fait pas partie du pain consacré et transformé dans l’Eucharistie, mais c’est du pain béni et pour cela il est traité avec respect. Dans la tradition russe (et parfois aussi dans certaines églises roumaines), après la communion est également offert un petit verre de vin.

Après la prière du Renvoi commune aux services de l’Église, les fidèles s’avancent pour embrasser les icônes et vénérer la croix avant de partir de l’église. Renouvelés par cette cène eucharistique, ils sont renvoyés dans le monde comme témoins du Christ.

Théologie de la liturgie

Alexandre Schmemann, dans l'Eucharistie, Sacrement du Royaume affirme que l'on doit vivre la Divine Liturgie comme une co-célébration, impliquant l'ensemble de l'assemblée, et non seulement du prêtre qui préside. Il s'appuie sur la structure dialoguée des prières eucharistiques. L'iconostase ne doit pas alors être comprise comme ce qui sépare les fidèles, laïc, de l'autel : toute l'église est sainte et il n'y a pas de consécration spéciale du sanctuaire. Le but de l'iconostase n'est pas de séparer mais de réunir : elle est la conséquence de l'Incarnation en rendant visible la présence du Ciel. Ce n'est pas la paroi qui exige des icônes, c'est la présence d'icônes qui exige une paroi.

Références

  1. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, éd. F.X. De Guibert et YMCA-Press, p.43-44.
  2. Nicolas Cabasilas, Explication de la Divine Liturgie, Sources Chrétiennes, ed. du Cerf.
  3. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, éd. F.X. De Guibert et YMCA-Press, p.50.
  4. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, éd. F.X. De Guibert et YMCA-Press, chapitre 2.
  5. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, p.89
  6. Nicolas Cabasilas, Explication de la Divine Liturgie, Sources Chrétiennes, ed. du Cerf, p.169.
  7. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, p.181.
  8. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, p.182.
  9. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, p.182.
  10. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, p.203.
  11. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, p.222.
  12. Alexandre Schmemann, l'Eucharistie, Sacrement du Royaume, p.222.
  13. Judas est l'énigme du mal se révélant lors de la Cène même, de l'homme qui se détourne et abandonne l'Amour de Dieu qui se donne à lui.

Ressources bibliographiques

  • Bradshaw, Paul, ed. Essays on Early Eastern Eucharistic Prayers (Collegeville, MN: Liturgical Press, 1997) ISBN 081466153X
Essays on eucharistic prayers (anaphoras) from various periods and locales.
  • Cuming, Geoffrey J. and R. C. D. Jasper. Prayers of the Eucharist: Early and Reformed (Collegeville, MN: Liturgical Press, 1987) ISBN 0814660851
Includes the texts of eucharistic prayers no longer extant as well as early redactions of the anaphoras of St. James, St. Basil the Great, and St. John Chrysostom.
A classic reflection on the meaning of the Divine Liturgy from one of the pioneers of liturgical theology.
  • Taft, Robert, SJ. Divine Liturgies — Human Problems in Byzantium, Armenia, Syria and Palestine (Burlington, VT: Ashgate, 2001) ISBN 0860788679
  • Taft, Robert, SJ. A History of the Liturgy of St. John Chysostom (Rome: Pontifical Oriental Institute)
This is a multi-volume work in progress. Currently, no ISBN are available. See the SVS Press website.
  • Volume II: The Great Entrance
  • Volume IV: The Diptychs
  • Volume V: The Precommunion Rites

Source

Liens externes

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